25 août.
Le ciel était bleu sur Washington. Il faisait chaud, trés chaud même. A la Maison Blanche, toutes les fenêtres, toutes les portes étaient fermées dans l'espoir de maintenir une once de fraîcheur dans la pièce où l'on se trouvait. On bénissait la climatisation, et le progrés.
Tout allait bien jusqu'à 14 heures 6 minutes 35 secondes. A cet instant-là, une épaisse fumée noire s'échappa du générateur principal de la climatisation. Il y eut une petite explosion. Et le générateur dernier cri acheté quelques mois plus tôt en prévision de l'été venait de rendre son dernier soupir.
_ Donna ! hurla Josh en apparaissant dans l'entrebaîllement de la porte de son bureau.
La jeune femme releva la tête de son ordinateur et lui répondit sur le même ton :
_ Quoi ?
_ Qu'est-ce qui se passe ?
_ Qu'est-ce qui se passe où ?
_ Le thermomètre de mon bureau indique 29 degrés.
_ Ouah.
_ Ouah, oui. Qu'est-ce qui se passe ?
_ Comment tu veux que je le sache ?
_ Est-ce que tu ne sais pas toujours tout ?
_ Moi ?
_ Toi.
_ Oui.
_ Et alors ?
_ Je ne sais pas.
_ Renseigne-toi tu veux ?
_ Bien sûr.
Elle s'éloigna dans les couloirs de la Maison Blanche, tandis que Josh regagna son bureau. Il était en nage. Il faisait beaucoup trop chaud pour pour travailler correctement sur ce fichu rapport... Il resta avachi sur sa chaise, immobile pendant quelques minutes. Puis, finalement, à regret, il tenta de reprendre le mémo pour le président là où il l'avait abandonné.
Trois petits coups résonnèrent sur sa porte.
_ Oui ?
C'était Donna.
_ La climatisation est en panne.
_ Quoi ?
_ La climatisation est en panne.
_ La climatisation ?
_ Oui. La chaleur te trouble l'ouïe ou quoi ?
_ La climatisation toute neuve qu'on a fait installé au printemps ?
_ La climatisation.
_ Celle qui a englouti la moitié de notre budget de chauffage de l'hiver ?
_ Oui.
_ Celle à cause de qui toute la Maison Blanche a attrappé la grippe en février ?
_ Celle-là.
_ Elle est en panne ?
_ Au vu de l'état dans lequel se trouve la salle des machines, je dirais plutôt qu'elle a explosé.
_ Des techniciens s'en occupent ?
_ Oui.
_ Ils espèrent l'avoir remis quand ?
_ D'ici vendredi... commença Donna.
_ Demain ? s'exclama Josh.
_ ...prochain, finit Donna.
_ Vendredi prochain ? s'étouffa Josh.
_ Vendredi prochain.
_ Crois-tu que c'est trop tard pour demander des congés ?
_ Oui.
A quelques mètres de là, Toby sortit de son bureau. Il paraissait vraiment furieux.
_ Bonnie !
_ Oui ?
_ Veuillez avoir l'amabilité de regarder le thermomètre. Quelle température affiche-t-il ?
_ 31 degrés.
_ Maintenant, veuillez regarder la télévision situé à votre droite, et me dire combien prévoit la charmante présentatrice de la météo pour Washington aujourd'hui ?
_ 40 degrés.
_ Et la climatisation est en panne.
_ Oui.
_ Donc nous sommes condamnés à travailler dans une fournaise jusqu'à ce que ces messieurs des services techniques aient réparé la climatisation.
_ On dit que c'est irréparable, glissa Cathy.
Cela lui valut un regard assassin de Toby.
_ Sam ! appela-t-il en se tournant vers le bureau de son adjoint.
Ce dernier était allongé sur son fauteuil, et buvait un soda glacé. Il somnollait.
_ Toby ? demanda Sam en sursautant.
Le contenu de son verre se renversa sur son bureau.
Toby entra avec un calme apparant qui laissait présager le pire.
_ Tu était en train de faire quoi ?
_ Je... Je lisais la finalisation du discours que le président doit dire demain soir, devant les syndicats des routiers.
_ Le discours qui était posé sur ton bureau ?
_ Euh... oui.
_ La dernière, l'ultime copie juste avant d'en faire les photocopies nécessaires ?
_ Oui.
_ Celui qui nage en ce moment sous une mer de soda ? hurla Toby.
Ce cri eut pour conséquence de faire à nouveau sursauter Sam.
_ Zut ! s'exclama-t-il en observant les dégâts.
_ Zut, répéta Toby incrédule. Quatre jours de travail, et zut !
Sam essaya de récupérer les feuillets, mais le soda s'était renversé partout. Il avait pris un grand verre, et avait à peine commencé à le boire. Il était donc plein lorsque l'accident avait eu lieu.
Margaret frappa deux petits coups au seuil du bureau de Léo McGarry, secrétaire général de la Maison Blanche.
_ Les messieurs du service technique disent qu'il va falloir tout changer.
_ Changer quoi ?
_ La machine entière.
_ La machine ? répéta Léo ne comprenant toujours pas.
_ La climatisation !
_ Eh bien ?
_ Elle est en panne.
_ C'est vrai qu'il fait un peu chaud...
_ Un peu ?
_ Pas de quoi faire toute une histoire.
_ Léo. Vous allez bien ?
_ Parfaitement pourquoi ? C'est vous qui n'avez pas l'air d'aller bien. Pourquoi portez-vous un mouchoir trempé sur la tête ?
_ Il fait 32 degrés actuellement dans la Maison Blanche.
_ Vous n'avez jamais vécu d'été ?
_ Pas d'été avec 32 degrés à la Maison Blanche.
_ Oh ! grogna Léo. Zou, retournez travailler au lieu de vous plaindre. Et essayer d'être un peu plus présentable, on est à la Maison Blanche ici !
Josh était allé se dégourdir les jambes. Il n'arrivait décidément pas à travailler. Il arriva dans les bureaux de la Communication. Il régnait une pagaille qu'il n'avait jamais vu. Et Toby avait définitivement perdu son sang froid.
_ Quatre jours, Bonnie ! Quatre jours que je sue sang et eaux, que je ne dors plus, que je ne mange plus, que je ne vis plus... pour écrire ce discours où le président doit empêcher une grève générale des transporteurs en convaincant les syndicats, et les ouvriers au cours d'une intervention télévisée. Quatre jours !
Un silence de mort régnait dans la salle.
_ Tout ça disparu ! Tous mes efforts dilués dans du soda !
_ Calmez-vous Toby... avança Ginger prudemment.
_ Oh, mais je suis parfaitement calme ! Si le pays est paralysé par une grève générale c'est parce que le directeur adjoint de la communication a voulu ajouter sa touche personnelle au magnifique discours sensé réussir à empêcher ça ! Une touche de soda !
Josh chercha des yeux Sam. Mais il ne le vit nulle part. Il devait avoir filer devant l'explosion de colère de Toby. Le Directeur à la Communication avait d'ailleurs l'air de souffrir de la chaleur, à en croire les perles de sueurs qui brillaient sur son front alors qu'il s'agitait vainement. Josh effectua une prudente retraire, préférant éviter Toby dans un moment pareil.
Un peu plus loin, il croisa C.J. Elle-aussi paraissait contrariée. Décidément, songea Josh, c'est la chaleur...
_ Qu'est-ce qui se passe ? demanda-t-il avec la voix la plus innocente possible.
_ Les syndicats ont décidé de lancer leur grève demain matin 6 heures.
_ Demain ? Mais je croyais que c'était prévu le 27 ?
_ Oui, mais ils ont avancé la date en raison du temps annoncé sur tout le pays.
_ La chaleur ?
_ Oui. Les gens crient encore plus quand ils sont coincés dans leur voiture alors qu'il fait 40 degrés dehors...
_ Super...
_ Heureusement que Toby et Sam ont fini le discours du Président. Il va devoir s'adresser aux routiers dans la soirée. L'heure est encore à fixer 19 ou 20 heures. Mais le président n'aura pas eu le temps de répéter. Pour la télé, ça va. Mais les syndicats risquent de lui poser des questions durant l'entrevue. Il ne faut pas se manquer.
_ Ah... parvint à dire Josh en esquissant un sourire plus nerveux qu'autre chose. Alors tu vas être ravie.
_ Quoi ? demanda C.J en le fixant d'un air soupçonneux.
_ Eh bien... D'aprés ce que j'ai pu voir dans le département de la Communication, il semblerait qu'il y ait eu un léger problème...
_ Quoi ? répéta C.J.
_ Du soda.
_ Du soda ?
_ Toby se fera une joie de tout t'expliquer...
_ Josh !
_ C.J ?
_ Qu'est-ce qui s'est passé ?
_ Va demander à Toby.
_ C'est à toi que je demande.
_ Promets-moi de garder ton calme.
_ Josh !
_ Y a plus de discours...
_ Y a plus de discours, répéta C.J. Y a plus de discours ? cria-t-elle.
_ Là, tu n'es pas calme.
_ Y a plus de discours ?
_ Il s'est dilué dans le soda.
_ Dans le soda ? Tu es en train de me dire que notre unique chance d'empêcher la complète paralysie du pays est parti dans du soda ?
_ En quelque sorte...
_ Où est Sam ?
_ Sam ? dit Josh ne comprenant pas la raison de la question.
_ Un idiot a renversé du soda sur un des discours les plus importants que le président doive faire, car, si ça râte, on va perdre au moins 20 points dans les sondages, n'est-ce pas ?
_ Oui.
_ Où est Sam ?
_ Je sais pas.
_ Merci.
C.J partit en courant dans les couloirs de la Maison Blanche. Josh l'observa s'éloigner en poussant un long soupir. Il aéra sa chemise. Seigneur, comme il faisait chaud. Il allait demander à Donna d'aller lui chercher une boisson glacée... Mais pas du soda.
Margaret frappa à nouveau deux coups à la porte de Léo.
_ Entrez, répondit le secrétaire général. Qu'y-a-t-il Margaret ?
_ Les routiers avancent leur planning.
_ Oui. Je viens de recevoir un coup de téléphone de C.J. Je vais aller chercher le président dés qu'il aura fini avec sa réunion. Il va falloir lui faire un briefing accéléré.
_ Il semblerait qu'il y ait un problème de ce côté-là...
_ C'est-à-dire ?
_ Eh bien, d'aprés ce que j'ai pu comprendre des hurlements de Toby, il n'y a plus de discours.
_ Comment ça il n'y a plus de discours ?
_ Et bien, comme vous le savez sûrement lorsqu'on renverse une boisson sur du papier. L'encre a tendance à se diluer, et à terme à disparaître.
_ Qui a renversé sa boisson sur le discours ?
Margaret eut une légère moue.
_ Au téléphone, Toby était tellement énervé... C'est pour ça d'ailleurs que je ne vous l'ai pas passé. Ces propos auraient pu être contagieux, ainsi que son humeur... Tout le monde était déjà énervé avec cette chaleur... Tout ça a...
_ Margaret ! coupa Léo.
_ Sam.
_ Sam, répéta Léo en secouant la tête.
Zoey Bartlet arrivait à l'instant à la Maison Blanche. Charlie Young était là pour l'accueillir. Ils échangèrent un court baiser.
_ Il fait chaud ici, remarqua Zoey. Ca me rappelle la Floride, mais en moins agréable...
_ La climatisation est en panne.
_ Bonnie ! hurla Toby en coupant la route des deux amoureux. Où sont passées les brouillons que je vous ai donné ?
_ Ils sont partis dans la poubelle hier soir.
_ Et les brouillons de mes brouillons ?
_ Idem.
_ Bonnie. Donnez-moi quelque chose ! Des notes, des brouillons, des bouts de phrases... Il me faut quelque chose ou je vais commettre un meurtre.
_ C'est un miracle qu'on veut Toby, pas un meurtre, grogna C.J.
_ Et où est Sam ? cria encore plus fort Toby en se plantant au milieu du couloir.
_ Sans doute a-t-il eu peur de tes tendances actuelles de meurtre, suggéra Josh, s'attirant les foudres de Toby comme de C.J.
Charlie entraîna Zoey dans un autre couloir, préférant éviter l'atmosphère qui régnait en ce moment dans l'aile ouest.
_ Qu'est-ce qui se passe ? demanda-t-elle, encore étonnée par la scène.
_ Du soda.
_ Du soda ?
_ On n'a plus le droit de boire du soda.
_ C'est pour ça que tout le monde est énervé ?
_ Sam a renversé son soda sur un discours trés important que ton père devait lire ce soir à la télévision.
_ J'ignorais qu'il devait passer à la télé ce soir.
_ Changement de programme de dernière minute. Enfin bon... Mieux vaut pas traîner dans l'aile ouest pour l'instant. Ton père t'attend.
Josh décida de regagner son bureau. Il ne pouvait pas être trés utile dans cette histoire. Et, à force de s'agiter, il avait de plus en plus chaud.
_ Donna, c'est moi ou il fait de plus en plus chaud ici ?
_ 34 degrés, Josh...
_ 34 ?
_ 34. Mais le centre national de météorologie prévoit plus de 40 degrés.
_ Dans la Maison Blanche ? s'étonna Josh attéré.
_ A Washington ! Il fait 41 degrés actuellement dehors...
_ Et quelle heure est-il ?
_ 16 heures.
Il y eut un silence.
_ Le président doit s'adresser aux routiers à 20 heures ?
_ Oui.
_ Donc, nous sommes là jusqu'à 23 heures minimum ?
_ Oui.
_ Tu peux allez me chercher à boire ? Quelque chose de frais...
_ La machine à boisson est en panne.
_ Quoi ? Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
_ Toby a demandé a ce qu'on la désinstalle.
_ Qu'on la désinstalle ? répéta bêtement Josh.
_ Oui. Il a dit que cette machine lui avait volé quatre jours de sa vie, et que si on la mettait pas dehors immédiatement, il allait le faire lui-même.
_ Et celle dans le département des journalistes ?
_ Toby l'a fait désinstallé aussi.
_ Pourquoi ?
_ Il a dit que s'il voyait une seule personne dans la Maison Blanche en train de boire quelque chose, il ne répondait plus de rien.
_ Tu crois que c'est la chaleur qui lui fait cet effet-là ?
_ Je ne suis pas psy.
_ Où est Sam ?
_ On le cherche.
_ Bon, ben moi, je vais me reposer dans mon bureau.
Josh avait à peine refermé sa porte qu'il poussa un cri de surprise.
_ Sam !
_ Josh.
_ Qu'est-ce que tu fais ici ?
_ Je me cache.
_ Dans mon bureau ?
_ Oui.
_ Toby te cherche.
_ Je sais.
_ C.J aussi.
_ Je sais.
_ Et Léo...
_ Je sais.
_ Ils vont te tuer.
_ C'est pour ça que je me cache.
_ Dans mon bureau ?
_ Oui.
_ Bien...
Josh s'assit sur un de ses fauteuils. Un silence pesant s'installa.
Le Président Bartlet embrassa sa fille, et remercia Charlie d'un signe de tête.
_ Alors, comment vas-tu ? Tes vacances à Miami ?
_ Superbes.
Le président contempla sa plus jeune fille. Elle avait pris des couleurs en Floride.
_ Prête pour la rentrée ?
_ Papa !
_ Quoi ?
_ C'est dans plus d'un mois !
_ Il faut bien t'y préparer... Je me suis d'ailleurs renseigner sur les options possibles pour cette année. Est-ce que tu savais que les maths...
_ Papa ! Tu es incorrigible ! Je ne veux pas faire de maths.
_ L'avenir appartient aux matheux.
Zoey fit une petite moue d'ange. Son père éclata de rire.
_ Je plaisante !
_ Quel sens de l'humour... J'ai vu qu'il y avait de l'agitation aujourd'hui ici.
_ Oui. La chaleur excite tout le monde.
Zoey sortit de son sac les photos de ses vacances à Miami. Elle avait bien entendu fait une sélection avant de les montrer à son père... Sans doute que celles où Charlie et elle s'embrassaient sur la plage n'auraient pas été trop du goût de son père.
_ Josh ! s'exclama Donna en entrant dans le bureau de ce dernier sans frapper.
Elle s'arrêta en voyant Sam.
_ Coucou ! fit-il en faisant un signe de la main.
_ Comment est-il entré ?
_ Donna, combien de fois je t'ai dit que tu ne pourrais jamais te reconvertir en gardien ? grogna Josh.
_ Je ne suis pas payée pour surveiller ton bureau...
_ Non.
Il y eut un silence.
_ Qu'est-ce qu'il y a ? demanda finalement Josh.
_ Euh... Léo veut te voir.
_ Moi ?
_ Oui.
_ Maintenant ?
_ Oui.
_ Il a dit pourquoi ?
_ Non.
_ Trés bien. J'y vais de ce pas...
_ Il avait l'air énervé, observa Donna tandis que Josh s'était levé.
_ C'est la chaleur, affirma Sam.
Les regards que lui adressèrent Josh et Donna lui arrachèrent un sourire contraint.
_ J'ai rien dit, enchaîna-t-il précipitament.
Josh et Donna sortirent du bureau.
Cela faisait cinq minutes que Sam était seul. Il zappait d'une chaîne à l'autre tout en se balançant sur son fauteuil lorsque la porte s'entrebailla, et se referma doucement. De surprise, Sam oublia un instant la loi de la gravité, et le fauteuil partit à l'arrière. Il s'écrasa sur le sol avec un grincement lugubre de boulons, et Sam avec lui.
_ Sam ! s'écria Mallory O'Brien en se précipitant vers lui. Ca va ?
Il essaya de se relever, mais en fut incapable.
_ Salut Mallory, dit-il néanmoins en se forçant à sourire.
_ Tu vas bien ?
_ Je crois... Mais, j'arrive pas à bouger.
_ Quoi ?
_ Je crois que ma ceinture s'est prise dans la chaise.
Il essaya à nouveau de se dégager. Sans succés.
_ Ce que tu peux être maladroit, grogna Mallory en l'observant.
_ C'est la chaleur...
_ En parlant de chaleur, qu'est-ce qui se passe ici ? On se croirait dans une fournaise.
_ La climatisation est en panne.
Il y eu un nouveau silence. Sam était toujours allongé par terre, et Mallory à genoux à côté de lui.
_ Qu'est-ce que tu fais ici ? demanda tout à coup Sam.
_ J'étais venue voir mon père.
_ Dans le bureau de Josh ?
_ J'ai rencontré C.J au passage.
_ Et ?
_ Elle m'a fait un bref résumé de la situation.
_ Ah...
_ Et je me suis dit que le seul endroit où je pourrais te trouver, étant donné que tu te terrais pour échapper à C.J et à Toby, c'est dans le bureau de Josh.
_ Brillante déduction.
_ N'est-ce pas ?
Il y eut un nouveau silence.
_ Tu me cherchais donc ? murmura Sam.
_ Quoi ? s'étonna Mallory.
_ Tu es venue dans le bureau de Josh pour me voir.
_ Oui.
_ C'est sympa.
_ Je suis venue t'apporter mon soutien intégral.
_ C'est gentil.
A nouveau, le silence s'installa. Chacun s'observait. Ils avaient tant de choses à dire, et rien ne sortait...
_ Je te croyais moins maladroit, dit enfin Mallory.
_ C'est la chaleur.
_ Quelle excuse !
_ Euh... Tu peux m'aider à me relever ?
La jeune femme lui prit la main. Leur regard se croisèrent.
_ Tu sais, Mallory, tu es trés belle vue de cette perspective.
_ Parce que je ne suis pas belle normalement ?
_ Oh, si, si... Mais tu es encore plus belle comme ça.
_ Merci.
_ Tu sais. Ca fait des mois que je voulais te dire quelque chose.
_ Quoi ?
_ Je crois que...
Mallory s'était penchée.
_ Moi aussi je voulais te dire quelque chose, lui chuchota-t-elle à l'oreille.
A nouveau, leurs regards se soudèrent l'un à l'autre.
_ Je t'aime, dit-elle doucement.
Avant que Sam ait pu répondre quoique ce soit, leurs lèvres se rejoignirent, et ils s'embrassèrent.
Sam était toujours coincé par terre à cause de la chaise, et Mallory était penchée sur lui. Tout à coup, la porte s'ouvrit sur Josh et Donna en pleine discussion.
_ Je t'assure, Donna, que... aaah !
_ Mallory ! s'écria Donna.
_ Sam ! dit de son côté Josh, qui eut le bon sens de fermer immédiatement la porte derrière lui.
_ Bonjour ! salua Mallory en se redressant.
_ Je suis bloqué, dit précipitament Sam.
_ Il a cassé ton fauteuil, affirma Mallory.
_ C'est de sa faute, dit Sam.
Une voix s'éleva à travers la porte.
_ Josh !
Les quatres personnes qui se trouvaient dans le bureau se figèrent.
_ Léo... répondit Josh en cherchant un trou de souris où se cacher.
_ Tu peux ouvrir, s'il-te-plaît, il faut que je te parle au sujet du mémo ?
_ Euh... oui... non... J'arrive dans ton bureau dans trente secondes !
Donna avait callé son pied contre la porte de manière à ce que Léo ne puisse l'ouvrir.
_ Ca va, Josh ?
_ Oui oui. Parfaitement bien. Ca va même trés bien.
Ses yeux balayaient la scène avec effroi : Sam bloqué dans son fauteuil, Mallory à ses côtés, son rouge-à-lèvre s'était étalé sur sa bouche, et Sam en avait plusieurs marques. Si jamais Léo voyait ça. Et dans le bureau de Josh en plus...
_ Mais, euh... Je te rejoins. Donna a essayé de ranger un peu mon bureau, et c'est un peu le bazar.
Sa secrétaire le foudroya du regard.
_ Josh...
_ Oui Léo ?
_ C'est toujours le bazar sur ton bureau.
_ Oui, mais là, c'est encore pire que d'habitude. Donc tu vois... Mais je te rejoins dans une minute.
Derrière la porte, Léo eut un instant d'hésitation. Mais finalement, il dit :
_ Dans cinq minutes, Josh !
_ Oui oui. Pas de problème.
Les quatres personnes de la pièce se permirent un long soupirement.
_ On a eu chaud, déclara Donna en enlevant son pied de l'angle de la porte.
_ Sam ! cria Josh en se tournant vers son ami.
_ Quoi ? Qu'est-ce que j'ai fait ?
_ Oui, c'est ce que je me demande. A quoi est-ce que tu joues ?
_ C'est la chaleur.
Josh se demanda s'il allait l'étrangler ou le jeter par la fenêtre.
_ Bon... euh... Je suis toujours coincé, déclara Sam.
Il avait l'air embêté.
_ T'as cassé mon fauteuil ? demanda Josh.
_ Mallory est entrée précipitament, et...
_ Donna, je sais que tu n'es pas payée pour surveiller mon bureau, mais néanmoins, j'apprécierais que tu observes les gens qui y rentrent et en sortent, grogna Josh.
_ Eh ! C'est pas ma faute si tout le monde rentre dans ton bureau sans prévenir ! s'écria-t-elle.
_ Bon... sans vouloir vous interrompre... murmura Sam. Est-ce que vous pourriez m'aider à me relever ?
Josh poussa un long soupir, et attrappa la main de son ami. Il tira violement à l'arrière. Le fauteuil et Sam se redressèrent. Mais les roues encore en état du fauteuil entrèrent en action, et Josh fut entraîné dans la nouvelle chute.
_ Aïe, ma tête ! s'exclama Sam.
Deux coups résonnèrent contre la porte.
_ Josh ? demanda la voix de Charlie.
_ Quoi ? cria l'intéressé en se massant le poignet gauche, sur lequel il était tombé.
_ J'ai quelque chose pour vous de la part de Zoey.
_ C'est pas le moment !
_ Euh...
_ Pose-le sur le bureau de Donna.
Il y eut un silence.
_ D'accord, répondit la voix hésitante de Charlie.
Sam se redressa.
_ C'est bon, je suis décoincé !
Josh le foudroya du regard. Il observa son fauteuil. Sam regarda lui-aussi les dégâts.
_ Je suis vraiment désolé, Josh...
_ C'est pas grave, soupira le secrétaire-adjoint de la Maison Blanche. Je le donnerais à l'Atelier.
_ L'Atelier ? demanda Sam sans comprendre.
_ Oui, mon copain Curtis, expliqua Donna.
_ Il est trés fort, affirma Josh. Il a réussi à réparer une roue à ce fauteuil. Un lien existe entre eux désormais...
_ Josh ! s'exclama Donna.
_ Quoi ? C'est pas vrai ?
_ Bon, c'est pas tout, mais je crois qu'il y a Léo qui t'attend, rappela Donna en interrompant Josh.
_ Ah oui... Euh... Sam, tu ne peux pas rester indéfiniment ici. Assume et va voir si Toby n'a pas besoin de toi.
_ Si tu veux, je te protégerais, murmura Mallory en s'accrochant à son bras.
_ Sans vouloir t'offenser Mallory, si tu défends Sam de cette manière, ce sera Léo qui le tuera, et non pas Toby... Mais le résultat sera le même.
Sur cette conclusion, Josh ouvrit la porte et sortit.
_ Tu as lu mon essai, alors ? demanda Mallory alors que Donna sortait à son tour avec un air dubitatif.
_ Ton essai ? répéta Sam alors que son visage se décomposait.
_ Oui. Tu te souviens ? Je te l'ai donné la semaine dernière. Je voulais tes impressions d'écrivain là-dessus...
_ Oh, mon Dieu ! s'exclama Sam.
_ Sam ? appela Mallory ne comprenant pas sa réaction.
Le jeune homme sortit précipitament du bureau. Mallory le suivit sans comprendre sa réaction.
Sam se précipita à son bureau. Il ouvrit le premier tiroir à droite, et en sortie une pochette.
_ Je l'ai ! cria-t-il.
Tout le monde le regarda sans comprendre, étonné d'ailleurs de voir une personne qui avait disparu de la circulation de la Maison Blanche, et qui avait tout intérêt à ne pas se faire remarquer, réapparaître brusquement.
_ Sam ! hurla Toby en sortant de son bureau.
_ Je l'ai ! répéta ce dernier en levant la pochette.
_ Qu'est-ce c'est ? demanda Toby en donnant l'impression de tenter de se maîtriser.
_ Le discours.
_ Le discours ? répétèrent sans comprendre Toby et C.J.
_ Mais oui. Ce n'était pas ça que j'étais en train de lire lorsque Toby m'a fait renverser mon soda. C'était l'essai de Mallory !
_ Sam ! crièrent en même temps Toby, C.J et Mallory, mais avec un ton différent.
_ Sam, comment as-tu pu... commença Toby au bord de la crise de nerf.
_ Tu as renversé ton soda sur mon essai ? Comment est-ce que...? cria Mallory, furieuse.
_ Ben euh... C'est la chaleur qui...
_ Sur l'unique manuscrit. Sur la version finie, peaufinée, réussie d'un bouquin sur lequel j'ai passé mes nuits depuis six mois !
_ Mallory je...
_ Et ne me parle plus de chaleur ! Ca n'a rien avoir, Sam ! Quand je pense que je te faisais confiance ! C'était l'unique version. J'ai effacé celle sur disquette avant-hier !
_ Je l'ai pas fait exprés. Excuse-moi...
Mais Mallory ne semblait pas prête à pardonner quoique ce soit. Elle avait même réussi à éclipser la fureur de Toby. C'est ce moment que choisirent Léo et Josh pour arriver.
_ Mais qu'est-ce qui se passe ici ? demanda le secrétaire général de la Maison Blanche.
Mallory le regarda, et se retourna vers Sam. Elle lui sauta au cou et l'embrassa au milieu de la salle. Le visage de Léo se décomposa.
_ Elle est maligne cette petite, murmura Toby en esquissant un sourire.
Il préféra récupérer rapidement la pochette du discours. Il se tourna alors vers son assistante.
_ Ginger, vous me faîtes au moins 15 copies de ce fichu discours, et vous me les rapporter dans cinq minutes...
_ Bien, répondit la jeune femme en observant Léo avec peur.
Mallory se tourna vers son père avec un sourire radieux.
_ Sam ! hurla ce dernier, il avait l'air lui-aussi furieux.
_ J'ai retrouvé le discours, glissa le jeune homme en se disant qu'il y a vraiment des jours où il fallait mieux rester coucher chez soi.
Léo interrogea Toby du regard, et ce dernier lui montra Ginger qui s'éloignait, une pochette à la main.
_ Dans mon bureau ! finit par articuler Léo. Tout le monde dans mon bureau !
Léo s'assit à son bureau avec calme trompeur.
_ Bien, dit-il à son staff qui finissait de rentrer, Josh refermant la porte. Quelqu'un aurait-il l'amabilité de m'expliquer ce qu'il s'est passé ici aujourd'hui ?
_ Ben, tout à commencer quand la climatisation est tombée en panne... commença Sam.
_ Sam ! s'exclamèrent Toby et C.J.
_ C'est vrai !
_ Josh, peux-tu me faire un résumé ? demanda Léo d'une voix trop calme au goût des autres personnes qui se trouvaient dans la pièce.
_ Euh... Sam a raison pour le point de départ. La clim' est tombée en panne. Il faisait chaud, et Sam a renversé son soda sur ce qu'il était en train de lire. On a cru que c'était le discours. Tout le monde s'est énervé. Et 3 heures plus tard, Sam s'est souvenu que c'était en réalité l'essai de Mallory qui avait disparu dans le soda...
_ 3 heures plus tard ? répéta incrédule Léo en fixant le directeur adjoint à la Communication.
_ Ben... sur le coup, j'y ai pas réfléchi... tenta-t-il de se justifier.
_ Donc, maintenant, on a le discours ?
_ Oui, répondit Toby.
_ Le président va l'avoir pour ce soir ?
_ Oui.
_ Bon, donc l'histoire du discours est réglée ?
_ Oui.
_ Parfait, vous pouvez y aller, soupira Léo.
Comme Sam se levait, Léo ajouta :
_ Sam, tu restes ici.
Sa voix était redevenue menaçante.
Josh glissa quelques mots à son ami avant de sortir :
_ Courage !
Mallory attendait un peu plus loin.
_ Josh !
_ Mallory ? répondit ce dernier avec hésitation.
_ Où est Sam ?
_ Ton père est en train de le tuer...
_ Bien, sourit Mallory, l'air satisfaite.
Josh la regarda en secouant doucement la tête. Puis, il s'éloigna en laissant la jeune femme à ses pensées.
Quelques minutes plus tard, Sam regagnait son bureau. Il avait l'air nerveux. Cathy l'accosta avant qu'il n'y entre.
_ Alors ? demanda-t-elle.
_ Alors quoi ?
_ Léo ?
_ Eh bien ?
_ Comment a-t-il réagi ?
_ Plutôt bien...
_ C'est-à-dire ?
_ Il a dit que si je buvais encore une fois du soda tout en lisant un document d'importance nationale, il me renverrait sur le champs.
_ Je ne parlais pas de ça, objecta Cathy en lui adressant un regard compatissant.
_ Moi si.
_ Pour Mallory ?
_ Il a dit que si je l'approchais à moins de cent mètres, il me tuerait avant de me virer...
_ Ca risque d'être difficile.
_ Pourquoi ?
_ Elle vous attends dans votre bureau.
_ Qui ?
_ Mallory.
_ Mallory ?
_ Oui.
_ Dans mon bureau ?
_ Oui.
_ Au secours !
_ Elle semblait trés calme.
_ Je crois que je vais rentrer chez moi. Il faut que je prenne un peu de repos aprés les émotions de la journée...
_ Les clés de votre appartement sont dans votre bureau, rappela Cathy d'une voix tranquille.
_ Ah oui... se rappela Sam qui recommençait à panique.
Sam réfléchit un instant au moyen d'échapper à la fille de son patron.
_ Vous devriez y aller, affirma Cathy.
_ Elle m'en veut ?
_ Oui. Mais elle vous aime.
_ Elle m'aime ?
_ Oui.
_ Vous croyez ?
_ Oui.
_ Alors j'y vais, décida Sam.
Cathy le regarda s'éloigner en secouant doucement la tête d'exapération.
Mallory était assise dans son fauteuil.
_ Tu es encore vivant ?
_ Ecoute Mallory, je suis vraiment désolé pour ton essai. Je sais trés bien que tu peux pas me pardonner, mais...
_ Sam, le coupa Mallory en se levant.
_ Oui ?
_ Je suis heureuse de ce qui s'est passé.
_ Hein ?
_ On a enfin pu se parler...
_ Ton père m'a... commença Sam tandis que Mallory s'approchait.
_ Sam ?
_ Oui ?
_ J'ai 29 ans. Je suis majeure. Mon père ne choisit pas mes relations.
_ Néanmoins... tenta d'objecter Sam.
_ Je t'aime.
_ Moi aussi.
_ Alors c'est parfait, se contenta de dire Mallory en refermant la porte derrière Sam et en baissant les stores.
Le soir-même, alors que le président faisait son intervention à la télévision, Josh le regardait à la télé, assis sur le bureau de Donna. Il mangeait du popcorn.
_ Tu sais quoi Donna ? grogna-t-il sans quitter des yeux le poste de télé.
_ Quoi ?
_ Il y a une morale à cette histoire.
_ Laquelle ?
_ Ne jamais travailler quand la climatisation est en panne...
_ Ils ont installé de petits générateurs dans toute la Maison Blanche. Demain, la température sera redevenue normale.
_ Mais pour la prochaine fois, on le saura.
_ Si tu le dis...
Ils écoutèrent durant quelques minutes le président faire son discours.
_ Pop-corn ? demanda Josh en tendant le cornet à Donna.
_ Merci, dit Donna en se servant.
_ Donna ?
_ Quoi ?
_ Je crois savoir ce qui s'est passé pour la climatisation...
La jeune femme le regarda d'un air bizarre.
_ Quand on l'a monté, je me souviens parfaitement avoir donné un coup de pied dedans. Tout le monde était malade, et ça m'avait rendu furieux. Et, une pièce est tombée de la machine. Je l'ai ramassée, et cachée au fond de mon bureau...
_ Josh ! s'écria sa secrétaire avec exaspération.
FIN
par Lyrys-In-Love